Les agriculteurs de Côte d’Or s’engagent pour lutter contre la disparition des oiseaux

Vous en avez peut-être entendu parler ces derniers jours : les populations d’oiseaux régressent depuis quelques années. L’utilisation des pesticides par les agriculteurs est notamment pointée du doigt. Les agriculteurs de Côte d’Or ont justement décidé de communiquer sur ce sujet.

22 mars 2018 à 11h30 par Fabrice Aubry

K6 FM

« Les agriculteurs sont, comme toujours, désignés comme responsables de tous les maux, sans se soucier d’une réelle expertise scientifique. Cette fois-ci, ce sont le CNRS et le MNHN qui mettent en cause l’agriculture dans la diminution des populations d’oiseaux. Si l’agriculture a un rôle à jouer dans la préservation de l’environnement et la biodiversité, elle n’est pas la seule. Les agriculteurs se remettent déjà beaucoup en question, et cherchent toujours de nouvelles solutions pour réduire leur impact sur la biodiversité. Mais seuls, ils ne pourront pas lutter efficacement contre le changement climatique et l’artificialisation des sols. Pourquoi ne pas tous nous remettre en question, au lieu de chercher des boucs émissaires ?

 

Dans un communiqué du 20 Mars 2018 largement diffusé, le muséum d’histoire naturelle et le CNRS mettent clairement en cause l’agriculture dans la régression des populations d’oiseaux communs. Comment des institutions publiques peuvent-elles livrer une interprétation aussi tranchée, malgré des justifications bancales, sans même la publication préalable du rapport dans une revue scientifique à comité de relecture par des pairs ? Comment peuvent-elles passer sous silence que, si la régression des oiseaux en plaine agricole est effectivement de l’ordre de 32 %, elle est aussi de 23 % dans les milieux dits « bâtis », assimilés aux milieux urbains entre 1989 et 20141 ? Les agriculteurs sont-ils donc responsables de tous les maux ?

Si nous reconnaissons que les pratiques agricoles ont pu participer au déclin des populations d’oiseaux, nous devons rappeler que cette chute est due à une multiplicité de facteurs. Parmi les causes principales d'érosion de la biodiversité en général, le dérèglement climatique et la destruction des habitats sont les plus menaçantes selon le Commissariat général au développement durable (CGDD) dans le rapport intermédiaire de l'évaluation française des écosystèmes et des services écosystémiques. En effet, l’érosion de la biodiversité s’explique d’une part par la forte baisse des surfaces agricoles (environ 68 000 ha/an qui disparaissent en France), ce qui constitue autant d’habitats ou réservoirs de biodiversité potentiels en moins pour les différentes espèces animales et végétales. « L'artificialisation du territoire et la consommation associée d'espaces naturels, agricoles et boisés demeurent préoccupantes », pointent les auteurs du rapport. D’autre part, les changements climatiques ne sont certainement pas étrangers à la dégradation de la biodiversité : « les effets (…) sont déjà perceptibles et en hausse dans l'ensemble des écosystèmes français », pointent les auteurs de l'étude précitée. « L'augmentation des températures, associée à une diminution des précipitations en été, pourrait conduire à des épisodes de sécheresse plus longs en métropole. Il en résulterait un déplacement vers le nord, ou vers les plus hautes altitudes, des aires de répartition des espèces et la disparition de certaines d'entre elles ». L’agriculture est loin d’être, à elle seule, responsable du changement climatique.

Enfin, rappelons que l’agriculture française s’adapte sans cesse aux nouvelles attentes sociétales et politiques. Si aujourd’hui, l’attention collective se porte sur la qualité et l’environnement, n’oublions pas qu’à une époque, l’enjeu était de nourrir tout le monde. Une flambée des prix du blé ? Les agriculteurs de Côte d’Or aimeraient bien, mais à l’heure actuelle les prix de marché permettent à peine aux céréaliers de se verser un salaire lorsque toutes les charges ont été payées. C’est donc bien une attente sociétale qui nous a menée dans ces systèmes, et non une sorte de cupidité des agriculteurs que suggèrent le CNRS et le MNHN.

L’agriculture a fait, et continue à faire de nombreux efforts en vue de préserver l’environnement et la biodiversité, tout en maintenant une production cohérente avec la nécessité de nourrir une population mondiale toujours plus nombreuse :

  • 700 000 km de haies sont entretenus par les agriculteurs en France
  • 800 000 km de bandes enherbées le long des cours d’eau, dont plus de 8 000 km en Côte d’Or
  • Plus de la moitié du territoire des Côte d’Or est classé en zone vulnérable, qui impose des mesures pour réduire les nitrates, notamment le raisonnement de la fertilisation azotée (les ventes d’azote ramenées à la surface fertilisable stagnent depuis 19914 ), mais aussi la couverture des sols avec pour effet de réduire le risque de lessivage des nitrates vers le milieu, mais aussi de conserver de la végétation pour les insectes dont se nourrissent les oiseaux.
  • De plus en plus de surfaces sont cultivées en agriculture de conservation, système dans lequel les terres ne sont jamais à nu pour améliorer les sols et leur faune

 

Ces éléments peuvent fournir nourriture et habitats aux oiseaux, et remplacent avantageusement les jachères (qui ne nourrissent pas très bien la planète…) : ils contribuent à limiter la dérive des produits de traitements des cultures, à stabiliser les sols et à les préserver de l’érosion…

 

Comme toute activité, l’agriculture participe peut-être à l’érosion des populations d’oiseaux, dans une proportion difficilement chiffrable. Mais elle agit aussi pour réduire son impact. Les grandes agglomérations peuvent-elles en dire autant ? L’agriculture fait partie de la solution pour lutter contre le changement climatique, à condition qu’on lui en laisse les moyens. Accabler sans cesse les paysans est au contraire contreproductif ! »

Communiqué de la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles de Côte d’Or 




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