Quartiers prioritaires en Bourgogne : comment les ménages en sortent-ils ?

Dans son dernier communiqué, l’INSEE de Bourgogne-Franche-Comté fait un bilan sur la situation des ménages Bourguignons habitants les quartiers prioritaires.

2 avril 2019 à 4h30 par la rédaction

K6 FM
Crédit : K6FM

La Bourgogne-Franche-Comté compte 58 quartiers prioritaires de la politique de la ville qui regroupent 150 000 habitants. Les habitants des quartiers de la région sont plus mobiles que les autres habitants des?villes?: 14?% ont changé de résidence principale dans l’année 2015, 2 points de plus qu’ailleurs. Ce taux masque des profils différents entre quartiers et environnements urbains?: les plus jeunes, très présents dans ces quartiers, sont les plus mobiles. À l’inverse, les résidents des logements sociaux le sont moins que ceux du parc privé, en raison de loyers plus faibles qui constituent un frein à la mobilité. Seuls 40 % des mobiles emménagent de nouveau dans un quartier prioritaire. Les autres s’installent d’abord ailleurs dans la ville. Les?départs de la géographie prioritaire ne concernent pas que les individus les plus aisés, ni ceux dont les revenus ont le plus augmenté?: le revenu de plus des trois quarts des sortants est resté stable entre 2015 et 2016, et un tiers vit toujours sous le seuil de pauvreté. Les quartiers attirent les populations les plus précaires, à la?recherche d’un logement à moindre coût?: 40?% des entrants dans les quartiers vivent sous le seuil de pauvreté. Mais ils attirent aussi des individus aux revenus intermédiaires, pour lesquels disposer d’un logement HLM permet de sécuriser leur situation économique. Alors que l’attractivité des quartiers reste faible, leur composition sociale évolue lorsque entrants et sortants n’ont?pas le même profil. Ainsi, plus de la moitié des quartiers prioritaires de la région se paupérisent?: le départ des?ménages les plus aisés s’accompagne d’arrivées de personnes plus démunies que celles qui y vivent déjà.

La nouvelle géographie prioritaire adoptée en 2015 a conduit à délimiter 58 quartiers de la politique de la ville (QPV) en Bourgogne-Franche-Comté. Comme ailleurs, ces quartiers cumulent nombre de fragilités. En particulier, ils dessinent le contour de territoires où le niveau de vie est faible au regard du niveau de vie médian en France métropolitaine, mais aussi de l’unité urbaine dans laquelle ils sont insérés. La structure socio-démographique de ces quartiers est bien connue : ils concentrent à la fois pauvreté et populations les plus vulnérables (familles monoparentales, immigrés, jeunes, chômeurs, etc.).

Les politiques publiques menées depuis le début de la politique de la ville ont plutôt consisté à améliorer la situation économique des habitants et la qualité de vie dans les quartiers. C’est le sens de la politique de rénovation urbaine menée avec le concours de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) depuis le début des années 2000, et qui se poursuit. L’autre enjeu de la politique de la ville, c’est d’accroître la mixité sociale afin de réduire le phénomène d’enclavement spatial et social. Cela s’est traduit notamment par la modernisation des logements, vecteur d’attractivité pour ces quartiers.

La mobilité résidentielle constitue d’autant plus un levier de transformation des quartiers que les profils de population entrante et sortante peuvent être très différents. Les effets des migrations peuvent donc conduire certains quartiers à se rapprocher du reste de l’unité urbaine en termes de niveau de vie, ou bien à poursuivre leur décrochage.

14 % des habitants des quartiers prioritaires ont changé de logement

La mobilité résidentielle est loin d’être négligeable dans les QPV. Les habitants des quartiers de Bourgogne-Franche-Comté changent plus souvent de logement que ceux qui résident dans l’environnement urbain, c’est-à-dire dans le reste de l’unité urbaine (Définitions). Qu’ils restent dans leur quartier ou le quittent, 14 % des habitants des 58 quartiers prioritaires de Bourgogne-FrancheComté ont changé de résidence principale entre le 1er janvier 2015 et le 1er janvier 2016, 2 points de plus que dans l’environnement urbain. Il s’agit du taux de mobilité régional (Définitions) le plus élevé, après celui de la Normandie (14,2 %). Dans la région, la mobilité varie de 12 à 19 % des résidents selon l’unité urbaine englobante, sans lien direct avec son profil (figure 1). En effet, ni la concentration de l’offre en logement social, ni la part de personnes vivant sous le seuil de pauvreté (Définitions) n’expliquent à elles seules la propension des individus à déménager ou non dans ces unités urbaines. En revanche, les plans de rénovation urbaine tels que les opérations de rénovation du bâti ou d’accession sociale à la propriété peuvent provoquer une plus ou moins grande mobilité une année donnée. C’est le cas par exemple lorsqu’il faut reloger les habitants des barres d’immeubles, comme dans le quartier de la Grette à Besançon. Au-delà, ces opérations de rénovation modifient significativement la morphologie urbaine de chacun des quartiers comme dans celui des Grésilles à Dijon où des opérations de démolition et de reconstruction de logements se sont achevées en 2012.

Les locataires du parc social déménagent moins souvent que ceux du parc privé

Dans la région comme ailleurs, la propension à déménager est très différente selon que l’on réside dans le parc HLM ou privé, comme locataire ou propriétaire. Globalement, les propriétaires qui représentent seulement 10 % des habitants des quartiers sont moins mobiles : ils n’ont été que 7 % à déménager en 2015. Chez les locataires, la mobilité est nettement plus forte : près de 15 % des locataires ont déménagé cette année-là. Mais pour les locataires du parc social (86 % des logements des QPV), habiter ce type de logement garantit une dépense plus faible que dans le parc privé, ce qui freine la propension à déménager. Ainsi, dans les quartiers de la région, seuls 12 % des locataires de HLM ont changé de résidence principale en 2015 contre 22 % des locataires dans le parc privé. Les quartiers abritent une population plus jeune, elle-même plus mobile. Création d’une famille, premier revenu stable ou première migration professionnelle : près de 22 % des 26-35 ans des QPV ont déménagé en 2015. Toutefois, la mobilité des jeunes reste moins forte que dans le reste des unités urbaines où près de 35 % des 26-35 ans ont déménagé en 2015. À l’inverse, au-delà de 35 ans, la mobilité des habitants de QPV est un peu plus forte que celle de l’environnement urbain, soit 11 % contre 8 %. En effet, l’augmentation du niveau de vie en milieu et fin de cycle professionnel permet à certains habitants des quartiers de les quitter, et même pour 22 % d’entre eux de devenir propriétaires à cette occasion.

Le solde migratoire des quartiers avec le reste de la France serait déficitaire

En 2015, 11 200 habitants ont quitté les QPV pour s’installer ailleurs en France, et 7 700 personnes qui résidaient en France auparavant s’y sont installés. Le solde migratoire des quartiers de Bourgogne-Franche-Comté avec le reste de la France serait donc déficitaire, comme pour la plupart des QPV des autres régions. La mobilité des habitants des quartiers se fait principalement en dehors des QPV : 60 % des mobiles s’installent hors d’un quartier prioritaire. Ces migrations restent urbaines pour les trois quarts des sortants. Les déménagements et emménagements se déroulent alors dans une large majorité (78 %) au sein de la même unité urbaine.

Seuls deux départs des QPV sur dix sont liés à des variations de revenu

Pour 80 % des partants de la géographie prioritaire, ce ne sont pas a priori des raisons économiques ou de reprise/perte d’emploi qui sont à l’origine de la mobilité. Que l’on soit pauvre ou pas, la variation du niveau de vie entre 2015 et 2016 reste très limitée (+ 4 %), et proche de ce qu’on observe dans l’environnement urbain (figure 2). En revanche pour 13 % des partants, soit 1 500 personnes, le déménagement s’accompagne d’une très forte hausse de leur niveau de vie, de près de 40 %. Il s’agit de personnes qui vivaient auparavant sous le seuil de pauvreté, et qui en sortiraient grâce à une reprise d’emploi. À l’inverse, pour 9 % des sortants (1 000 personnes), le départ est lié à une forte chute de revenu, de près de 4 000 € entre 2015 et 2016. Pour les trois quarts, il s’agit de jeunes de moins de 35 ans, dont une moitié de mineurs. Ces départs de personnes pauvres pourraient être liés à trois phénomènes. En premier lieu, ils pourraient correspondre au départ de jeunes qui quitteraient le foyer familial avec très peu de revenus, avant un premier emploi pérenne. En second lieu, ils pourraient également être associés à la faiblesse de l’offre de logement de grande superficie dans les quartiers qui conduirait les familles nombreuses notamment à en partir. D’une part, les grands logements existants restent souvent occupés par des personnes plus âgées dont les enfants ont quitté le domicile familial depuis longtemps. D’autre part, les opérations de rénovation urbaine favorisent des surfaces plus réduites.  

Communiqué de l’INSEE de Bourgogne-Franche-Comté 



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