Une mobilisation contre l’implantation d’Amazon à Longvic
Amazon prévoit d’installer prochainement une plateforme de livraison à Longvic. Un projet qui suscite l’opposition de nombreuses associations de la métropole dijonnaise.
24 novembre 2021 à 19h08 par Fabrice Aubry
De par sa position dominante au niveau mondial et ses pratiques pas toujours très écologiques (destruction parfois de marchandises non vendues), Amazon suscite toujours un certain rejet d’une partie des consommateurs et des commerces locaux. Cette opposition est également partagée par les associations écologistes. Alors que l’annonce de l’implantation d’un local du géant du commerce en ligne est annoncée à Longvic, plusieurs associations dijonnaises (Greenpeace Dijon, les Amis de la Terre Côte-d'Or, ATTAC21, Oxfam Dijon, Nature & Progrès Bourgogne et les Amis des jardins de l'Engrenage) se sont mobilisées en écrivant une lettre ouverte à François Rebsamen et à José Almeida, le maire de Longvic.
Voici ci-dessous cette lettre :
« Nous avons appris par les médias locaux que la société Amazon (multinationale spécialisée dans le e-commerce) est en train de construire une « agence de livraison de proximité » à Longvic. Ce projet initié depuis avril 2020 s’est fait dans le plus grand secret, avec votre totale complicité, par l’intermédiaire d’une société immobilière écran. À l’heure où l’inaction de nos dirigeants lors de la COP26 nous laisse entrevoir un réchauffement de 2,7 degrés à l’horizon 2100, nous sommes extrêmement étonnés et atterrés par cette nouvelle. Comment se fait-il que vous ayez accepté cela en délivrant le permis de construire sur ce site qui abritait une entreprise dédiée à une énergie renouvelable – FranceEole ? Firme qui, elle, n’a pas reçu le soutien nécessaire au maintien de son activité.
Nous nous permettons de vous rappeler que :
Le bilan carbone annoncé par Amazon équivaut à 10% des émissions globales de la France, et l’équivalent de celles de la Bolivie. Néanmoins, il est largement sous-évalué. Il ne prend pas en compte les émissions liées à la fabrication des 15 milliards de produits vendus, par exemple. De plus le modèle Amazon pousse à la surconsommation et à la surproduction.
Le transport des produits qu’elle vend à travers le monde requiert des centaines de millions de trajets en camions, des millions de trajets en bateau et environ 48 000 trajets en avion. Amazon a massivement recours au transport aérien de marchandises, en louant déjà plus de 70 appareils. Pour assurer le service Prime et la livraison en 24 heures sur l’ensemble des territoires où il s’implante, Amazon assume sans complexe développer sa propre flotte d’avions pour les « Membres Prime qui aiment les livraison ultra-rapides, les prix attractifs et l’important choix disponible chez Amazon ». Il dispose ainsi de 20 espaces réservés dans les aéroports aux Etats-Unis et vient d’en ajouter un nouveau en Californie. Le fret aérien de marchandises d’Amazon représente donc à lui seul des émissions de gaz à e et de serre considérables.
Amazon ou l’art du greenwashing : Amazon met en avant, par exemple, la commande de 100 000 camions électriques pour réduire ses émissions. Mais ce chiffre est bien grotesque comparé aux quelques 1,4 million de camionnettes à moteur thermique qu’elle utilise à travers le monde. Sans parler de l’augmentation du traffic aérien, pour proposer des délais de livraison toujours plus courts !
Son activité de stockage de données informatiques émettrait 55,8 millions de tonnes de gaz à effet de serre en 2018, soit l’équivalent des émissions annuelles du Portugal.
Ne nous laissons point berner par les apparences d’engagements écologiques de ces géants de l’économie ultralibérale, comme avec l’initiative The Climate Pledge, lancée en 2019 conjointement de Global Optimism. Ce programme d’enfumage pour atteindre la neutralité carbone d’ici à 2040 repose sur toujours plus de consommation en compensant de façon différée les émissions de gaz à e et de serre. Il avait été lancé en réponse à un mouvement de grève – inédit à l’époque – au siège de la multinationale... L’astuce de ce greenwashing ? Mettre des produits certifiés écoresponsables en avant sur la plateforme, planter quelques milliers d’arbres mais continuer, dans le même temps, à allonger la durée de navigation numérique ou à détruire des produits neufs renvoyés par les clients !
En bref, les activités de cette multinationale sont totalement incompatibles avec une transition écologique pragmatique de la métropole, ainsi que de Longvic avec sa charte 2030.
Amazon dissimule son chiffre d’affaires réalisé en France (57 % en 2017), ce qui lui permet de pratiquer une évasion fiscale massive en déplaçant une grande partie de ses bénéfices vers l’étranger. Cela a bien sûr des impacts négatifs sur les recettes fiscales des États où est présent Amazon, mais ce recours massif aux paradis fiscaux renforce également la position prédominante d’Amazon vis-à-vis de ses concurrents, plus petits, qui paient en proportion de leur activité davantage d’impôts.
Amazon paye 0 € d’impôt sur les ventes pour son activité en Europe.
Amazon et les autres acteurs du e-commerce ont développé un système de fraude à la TVA généralisé, qui a coûté près de 5 milliards d’euros à l’État français en 2019 !
La venue d’Amazon sur une commune entraîne souvent des investissements publics considérables en infrastructures au bénéfice principal d’Amazon comme à côté de Metz (35 millions d’euros environ). Qu’en est-il de Longvic ?
Amazon prévoit d’ouvrir 35 nouveaux projets d’entrepôts en France d’ici à n 2023, ce qui pourrait entraîner la destruction de plusieurs milliers d’emplois dans l’hexagone. La dernière étude réalisée en France démontre que 1 emploi créé par la multinationale est responsable de la destruction de 6 emplois dans le commerce de proximité et, en moyenne, de 2 emplois dans le commerce global (commerce de proximité et grandes surfaces).
Amazon met en place des conditions de travail parmi les plus dures du sec- teur : cadences imposées et harassantes, rémunérations inférieures à celles pratiquées dans le secteur, abus d’utilisation des intérimaires, pratiques de licenciement en n de période d’essai, mesures de contrôle et de surveillance des salarié·e·s.
Les livreur·se·s (généralement précaires et/ou en situation irrégulière) sont ubérisé·e·s et mis·es sous pression sans possibilité de pouvoir s’organiser ou se syndiquer.
Amazon, en développant l’automatisation dans les entrepôts logistiques et la livraison par drone, cherche à se débarrasser du facteur humain.
Pour toutes ces raisons nous ne comprenons pas votre choix. La création de 50 emplois qui vont en détruire davantage alors que, via l’affichage publicitaire et autres communications dans Dijon Mag, vous dites soutenir les commerçants locaux. Est-ce cela votre vision du « dynamisme économique et de l’attractivité de l’agglomération » ? Et quid des émissions de CO2 amplifiées, alors que vous cherchez à obtenir le label Capitale Verte européenne ?
Le monde selon Amazon n’est pas viable ! Pourtant, il arrive dans la métropole... »