Aux Grésilles, les CRS patrouillent mais les dealers restent

Nous nous sommes rendus ce lundi soir dans le quartier dijonnais des Grésilles à l’occasion du rassemblement solidaire organisé après l’incendie criminel survenu ce week-end à la médiathèque Champollion.

Publié : 4 mars 2025 à 16h40 par Fabrice Aubry

Une compagnie de CRS est déployée en renfort dans le quartier des Grésilles
Une compagnie de CRS est déployée en renfort dans le quartier des Grésilles
Crédit : Photo d'illustration K6FM

C’est toujours la consternation dans le quartier des Grésilles après le deuxième incendie volontaire survenu en seulement 15 jours qui a touché la médiathèque Champollion. Cet acte de vandalisme semble correspondre à une vengeance des dealers du quartier après une opération de police organisée la semaine dernière contre le narcotrafic. En signe d’opposition à cette situation, environ 250 personnes se sont rassemblées symboliquement ce lundi soir devant la médiathèque. Cette manifestation solidaire a rassemblé de nombreux élus mais aussi des habitants du quartier, souvent très affectés par cet incendie qui a touché un lieu culturel qu’ils appréciaient. Retrouvez ci-dessous les extraits de quelques témoignages recueillis ce lundi soir : 

Micro trottoir
Micro trottoir
Crédit : K6FM

Pour tenter de rétablir l’ordre, et à la demande du préfet de Côte-d’Or, Paul Mourier, une compagnie de CRS a été appelée en renfort dans le quartier des Grésilles. Parallèlement, les services judiciaires enquêtent pour retrouver les incendiaires. « La réponse doit être ferme face à ces actes criminels qui privent les habitants d’un équipement culturel. J’appelle à une réponse ferme de l’Etat », c’était en quelques mots le message de Nathalie Koenders, la maire de Dijon, accompagnée de plusieurs de ses adjoints ce lundi soir aux Grésilles. Après un discours adressé au public présent, la maire s’est ensuite exprimée devant la presse. Elle nous a précisé à cette occasion qu’après ce deuxième incendie, la médiathèque Champollion pourrait ne pas rouvrir en 2025, mais que des solutions provisoires seront trouvées pour palier à ce problème et tenter de conserver un service culturel pour les habitants.  

La présence policière accrue ne semble pas gêner les dealers

Après ces prises de parole et alors que la foule s’est peu à peu dispersé, je décide de parcourir le quartier des Grésilles, et je découvre une situation surréaliste. La police est bien présente à quasiment chaque coin de rue avec de nombreux camions de CRS, mais les guetteurs ne bougent pas des points de deals habituels. Sur le bord de l’avenue Champollion en direction du lycée Eiffel, deux jeunes hommes sont présents assis chacun sur une chaise. Ils attendent « le client » et ne semblent pas gênés outre mesure par la présence accrue de la police. Un peu plus loin, sur l’avenue des Grésilles, près de la place du marché, j’interpelle un guetteur pour avoir son ressenti sur la situation. Ce dernier me répond : « Il y a souvent la police ici, mais qu’est-ce que tu veux ? Nous on est obligés de continuer à travailler, sinon on est mort ! Sinon, on se fait tuer par notre patron ! » 

A 300 mètres, à peine, un camion de CRS est stationné sur l’avenue Champollion et j’engage la conversation avec le chauffeur. Il me confie que lui et son équipe viennent de Lyon et font partie des équipes appelées en renfort par le préfet. Lorsque je lui demande pourquoi les guetteurs postés à proximité ne sont pas arrêtés, il me répond avec un brin de fatalisme : « Oui, on les arrête, mais que voulez-vous ? Ils sont amenés en garde à vue et sont relâchés presque aussitôt ! »

La réponse de l’Etat est-elle donc assez ferme comme le demande la maire de Dijon face à ces trafics de drogue qui ne cessent de prospérer ? Visiblement non. La venue de cette compagnie de CRS ne sera-t-elle qu’un coup d’épée dans l’eau ? Et la lutte contre le narcotrafic est-elle un combat sans fin à Dijon, comme ailleurs ? Dans certains quartiers sensibles, le trafic de drogue a pris une proportion tellement importante qu’il semble trop difficile de lutter contre. Lorsque la police arrête des guetteurs, des dealers ou d’autres membres de ces réseaux, les représailles sont immédiates contre les services publics des quartiers. Il y a 5 ans, les rames du tramway étaient caillassées à Chenôve, aujourd’hui c’est la médiathèque des Grésilles qui est incendiée à deux reprises. Et les habitants des quartiers (ceux qui ne sont pas mêlés aux trafics) en pâtissent grandement. L’une des images fortes qui me restera à l’issue de cette soirée de reportage, c’est celle d’un enfant qui s’est mis à pleurer dans les bras de sa mère lorsque je leur ai appris que la médiathèque Champollion pourrait ne pas rouvrir en 2025 après l’incendie de ce week-end.

Fabrice Aubry / reportage réalisé ce lundi 3 mars dans le quartier des Grésilles 




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